Analyses de marchés

Rallye technique, nuages persistants

Juin 2025

Le 9 avril, nous soulignions que le marché offrait un point d’entrée attrayant ; il nous aura pris de vitesse. En l’espace de trois semaines, les portefeuilles vol-target, les CTA et les stratégies momentum, jusque-là allégés, se sont réexposés d’un bloc. L’impulsion technique l’a emporté : les flux acheteurs se sont nourris d’eux-mêmes, poussant les indices vers leurs sommets antérieurs sans que l’environnement macroéconomique ne s’améliore réellement. Ce décalage entre la mécanique de marché et les fondamentaux mérite aujourd’hui un examen attentif.

Un marché porté par la mécanique, non par la macro

La trajectoire budgétaire américaine reste la principale source d’inquiétude : la dette fédérale croît plus vite que le PIB ; Moody’s a d’ailleurs abaissé la note souveraine. Aucun plan crédible de consolidation n’est sur la table ; Moody’s a ainsi abaissé la note des Etats-Unis. Dans ce contexte, le rendement du Treasury 30 ans a franchi puis consolidé au-delà de 5 %, signe qu’un seuil psychologique a cédé : l’idée d’un « plafond » paraît révolue. Le ratio dette/PIB et le déficit budgétaire de la zone euro semble presque frugale en comparaison.

Les tensions commerciales ajoutent à la fragilité : les surtaxes entre Washington, Bruxelles et Pékin ne sont suspendues encore que temporairement, et les tout derniers jours ont montré combien les rumeurs puis les démentis pouvaient faire vaciller les marchés. De telles oscillations soulignent combien la visibilité des entreprises — et donc la durabilité des marges — dépend d’accords toujours susceptibles d’être remis en cause.

Côté microéconomique, les résultats de l’IA, de la tech et des semi-conducteurs ont, pour l’heure, dépassé les attentes. La question est moins celle du trimestre écoulé que de la pérennité de ces performances si les programmes d’« on-shoring » américains ou de nouvelles barrières douanières venaient alourdir les coûts de production et contracter la demande mondiale. Dans un couple « 30 ans au-dessus de 5 % / déficit budgétaire en hausse », la menace n’est pas tant le défaut formel que la rupture de confiance : une dynamique où chaque point de base supplémentaire accroît la charge d’intérêts, accentuant le besoin d’émission, donc la pression sur les taux. Dans ce contexte, engranger une partie des gains tactiques et chercher des relais de performance moins corrélés devient, à nos yeux, la voie à suivre.

Où se loger ? Les produits structurés continuent de séduire

À l’ère des taux zéro, les produits structurés permettaient d’aller grappiller quelques points de rendement. Aujourd’hui, la hausse des taux en fait un outil de revenu visible et, paradoxalement, moins sensible aux à-coups de marché. Notons notamment l’essor important en France des notes à capital garanti indexées sur un taux CMS 10 ans , qui se placent autour de 7 % en euros. S’il est essentiel de rappeler que la garantie joue à échéance, le prix en cours de vie, reste lui volatil. Pourquoi ces supports sont-ils tant plébiscités aujourd’hui ? Les coupons de ces produits CMS restent bien conditionnels à une remontée des taux limitée par rapport aux niveaux actuels. Mais la décorrélation croissante entre les taux américains et européens joue ici: si les pressions désinflationnistes qui s’accentuent en Chine venaient à gagner l’Europe, les CMS en euro pourraient fléchir tandis que les Treasuries resteraient tendus. L’essor actuel des structurés s’explique aussi par la déception laissée par d’autres supports alors estimés prudents. En 2022, les fonds immobiliers et obligataires, pourtant considérés comme « sécurisants », ont essuyé des pertes marquées lorsque les taux se sont envolés. Les produits à capital garanti comblent désormais le vide laissé par ces placements dans l’allocation des investisseurs.

Les structurés actions défensifs constituent une alternative aux positions directionnelles classiques : elles permettent de viser des coupons annualisés élevés, même si les indices stagnent ou reculent modérément. Dans un environnement où la trajectoire obligataire est incertaine et où les valorisations actions intègrent déjà beaucoup d’optimisme, privilégier ce type de profils revient à échanger une partie du potentiel haussier contre une probabilité accrue de performance contractuelle.

Le mouvement haussier déclenché mi-avril provient avant tout d’un rééquilibrage forcé des portefeuilles, pas d’un changement de toile de fond macroéconomique. Or, cette toile reste dominée par un endettement américain sans trajectoire crédible, des négociations commerciales à la merci d’une annonce de surenchère inattendue, et un moteur de croissance et rentabilité porté par l’IA. Après un tel rebond, il paraît raisonnable de convertir une partie des gains en revenus contractuels, en attendant que le brouillard se dissipe.

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